Ah ! Mes aïeux !

Qui n'a pas entendu ou prononcé cette exclamation ? Nous observant pendant que nous nous évadions de la réalité du moment, ma mère nous disait souvent : "tu penses à ce que deviendront les enfants de tes petits enfants ?" Il nous paraissait loin et bien abstrait ce temps qui arrive à grands pas, pourtant.

La plus part d'entre nous sont grand mère d' enfants déjà bien grands ! Quelques pas encore et il sera là ce temps au quel nous ne pensions pas. Je ne sais si elle y pensait, elle, ni si sa mère le lui disait aussi. Quoique je l'imagine. 

Imaginaient elles, aussi que grâce à cette formidable machine à remonter le temps, qu'avec internet, on apprivoise, nous nous imprégnerions de nos racines ?

Les archives ne sont pas toujours trés lisibles, hélas, les homonymies nombreuses et les dégâts du temps ont fait oeuvre dans les registres. Cependant, la généalogie offre plus d'une piste que chacun peut explorer. Certes, elle ne dit pas tout, mais avec un peu de recherche et de documentation, l'affectif faisant le reste, on se plaît à naviguer au pays de nos ancêtres. 

Je m'y penche avec passion. Ce que j'y trouve me trouble parfois, me déroute tout autant, me fascine et m'encourage.

M'encourage à me battre conte les injustices, contre la pauvreté, contre les violences faites aux faibles, contre la guerre et la misère.

La généalogie, liée à notre histoire  collective, est un enseignement social et nous dit que rien n'est jamais acquis. Que sans relâche les peuples ont dû arracher la plus petite once de bien être et de progrès. Qu'il ne faut surtout pas laisser à d'autres le soin de s'occuper de nos affaires, surtout pas au monde des affaires. Que nos ancêtres ont dû lutter, mourir pour défendre leur terre et pour manger, se soigner, s'instruire et rester digne. La solidarité dont ils faisaient  preuve les uns envers les autres était une leçon de partage, de courage mais surtout d'humanité. 

Je n'imagine même pas à quel point la vie a pu être dure et pourvue de déconvenues pour eux tous, nés sur un sol rugueux. Combien de drames s'y sont déroulés, combien de souffrances endurées. Combien de mères, combien de femmes ont pleuré un enfant mort, un père, un mari trop tôt parti. Combien d'homme se sont penché sur la boissson pour oublier. Combien ont ils peiné pour survivre à une exixtance miséreuse, où seul le labeur et la prière étaient autorisés.

Comment a bien pu vivre cette ancêtre, Antoinette,  aïeule de ma mère, Journalière agricole, veuve une première fois,  et déjà mère  dont le père de 4 ses enfants mourut au combat au mois de mars de 1811.

Chez nous,  les récoltes étaient mauvaises  cette année là. Le peuple  confronté à la famine, fut contraint à la révolte et  de nombreuses  émeutes et attaques de convois de blé eurent lieu dans les campagnes, laissant pour morts ceux qui les conduisaient. Partout c'était la guerre. L'Europe s'embrasait sous la mitraille, Napoléon préparait  sa campagne de Russie.

Guillaume Borie, père de 4 enfants dont le dernier n'avait qu'à peine deux ans, lui, était soldat. Peut être, au cours de sa campagne,  avait-il croisé Moustache, le chien soldat, qui fut décoré par l'empereur pour services rendus à l'armée. Peut être fut il vaillant et courageux, mais lui ne le fut pas. peut être, avant de mourir, a-t-il pensé aux siens, laissé dans un coin d'Auvergne, où poussent la ronce et le muscat ? On dit que l'été fut sec et le raisin sucré, mais ça Guillaume ne le saura pas.

Ce n'est qu'en 1826, au mois d'octobre que parvinrent à Charel son acte de décès délivré par la préfecture où se situait l'hopital qui recueillit son dernier souffle et sans doute, peut être son désarroi.

Antoinette, elle, n'eut d'autre recours que de continuer à louer ses bras. Et qu'avait elle bien pu répondre quand le petit Joseph la questionait sur  son papa ?

Joseph, dont le fils Charles au destin tragique, mourut en route, revenant d'une noce où il jouait du violon, ayant croisé au détour d'un bois, son meurtrier qui le dévalisa, ne connu pas  Claudius son petit fils, mon grand père, âgé de 18 mois qui lui ne se souvint pas de son papa. Si sa soeur Maria, âgée de 5 ans au moment du drame,  fit tout pour seconder sa mère, c'est le frère de Charles, Augustin qui éleva ses enfants avec les siens. Sans l'aide de sa famille et de ses voisins, Marie Françoise, mon arrière grand mère n'aurait pu élever ses enfants, faire fructifier sa terre, et même l'agrandir. Nous ne sommes pas riche de rien. Ils n'avaient rien, mais donnèrent tout pour que vivent les leurs, les épargnant comme ils le pouvaient mais du mieux qu'ils le savaient faire.

Aujourd'hui, où on a déjà tout ou presque, on se donne bonne conscience en achetant le dernier gadget à nos enfants, qui nous échappent, à qui on ne donne que du temps saupoudré, volé, emprunté. On n'est même pas capable de se battre pour préserver les acquis que nos vieux nous ont légués.

Comments

[delia]

Bonsoir Ambre, effectivement je sais à quel point cette question te passionne aussi. Tu attaches également beaucoup de soin à faire vivre l'histoire de tes ancêtres ce qui rend tes billets passionnants. Il faut de la patience, de l'abnégation parfois pour retrouver une bribe d'information qui nous permettra d'avancer dans la bonne voie. Je viens à peine de me lancer dans cette aventure mais elle me permet de découvrir avec quel courage ils ont construit leur vie. J'en éprouve un grand respect et une tendresse émue pour eux. J'ai envie d'en savoir plus bien sûr et l'inspection des greniers ne me donne pas tellement d'information. Mais comme je ne peux pas trop bouger en ce moment, j'explore les sites internet ! Je t'envoie des gros bisous et te dis à demain, on va essayer de dormir en attendant. Bonne nuit.

[Ambre]

Bonjour Délia,

ça fait longtemps que tu n'as pas écrit sur "Des hirondelles" et je commençais à me demander comment tu vas en ces temps troublés.. Je pense rarement à venir ici, je ne sais pas pourquoi... donc, je vais m'abonner à ce blog!!

Quel billet passionnant, ainsi que tous les commentaires! tu imagines aisément à quel point il me parle! moi aussi, je suis en plein dedans en ce moment. Mais comme j'avais commencé mes recherches lorsque j'étais ado, j'ai beaucoup de "matériau" pour pouvoir écrire ou plutôt "ré écrire" la chronologie de la vie de mes ancêtres, surtout avec ce que je trouve en complément sur internet, qui comme tu le dis est magique!

Un peu à la façon du texte que tu m'avais envoyé, je ré écris donc l'histoire, notre histoire.. Un seul manque à l'appel et nous ne serions pas là..



quant à l'expression "Ah mes aïeux!" oui oui, je l'ai souvent entendue!

Gros bisous Délia. Je vais de ce pas imprimer ta note pour la relire tranquillement!

[Fabie]

Je n'ai jamais entendu cette expression dans ma famille, par contre mon grand père paternel, lorsqu'on se faisait mal nous disait : "tu ne t'en souviendras pas le jour où tu te marieras", je me souviens que je lui disais que si :)

Le pauvre est mort en 1969 = Grippe de Hongkong...

("l'ampleur exacte de cette grippe «oubliée» : «25 068 morts en décembre 1969 et 6 158 en janvier 1970, soit 31 226 en deux mois, révèle Antoine Flahault. La grippe de Hongkong a tué en France deux fois plus que la canicule de 2003 ! Fait frappant, cette énorme surmortalité saisonnière est passée pratiquement inaperçue.»)

https://www.liberation.fr/grand-angle/2005/12/07/1968-la-planete-grippee_540957

Je savais qu'il avait été prisonnier durant la guerre, mais j'ai appris en faisant un peu de généalogie qu'en fait il avait été prisonnier durant toute la guerre, soient 5 ans, et que donc mon père était resté de 6 à 11 ans tout seul avec sa mère, ce qui l'a mené à ses déviances...



J'espère que tu n'es pas trop fatiguée Délia

Je t'embrasse très fort

[JAKlineP]

Bonjour

Quel plaisir de lire ce billet!



Passionnée de généalogie, je comprends tout à fait ton attitude vis-à-vis des tes ancêtres

J’ai eu la chance de pouvoir remonter sur toutes mes branches jusque dans les années 1600 et pour certains avant, sous le calendrier « Julien », comme disent les généalogistes.

A chaque fois que de trouve un acte, j’imagine cet ancêtre – terrien-qui a dû avoir une vie pas très facile.

Lorsque j’ai le bonheur d’avoir un signature c’est encore plus de satisfaction, c’est en quelque sorte sa photographie.

Et je parcours sur google les lieux de leur vie, bien sur plus rien n’existe en maison, mais cela m’invite à la rêverie imaginaire



J’ai un site généalogique

https://gw.geneanet.org/jacpitiotfree_w

Peut-être en as-tu un également ?





j ai aussi un autre blog sur ma généalogie,

http://jakgenealogie.canalblog.com/



Amicalement.

[heure-bleue]

Même si ta généalogie raconte des vies difficiles, tu trouves, chez moi, c'est bouché des deux côtés, je ne sais pas grand chose de mes ancêtres.